La réalité augmentée pour vulgariser la recherche spatiale

La réalité augmentée pour vulgariser la recherche spatiale

Recherche spatiale : interview de Raphaël Peralta, astrophysicien et médiateur scientifique

Dans le monde captivant de la recherche spatiale, Raphaël Peralta, astrophysicien et fervent médiateur scientifique, partage avec Okay Doc, en partenariat avec RA’pro, son parcours académique et son utilisation novatrice de la réalité augmentée dans la diffusion des connaissances spatiales de manière interactive pour atteindre un public plus large.

Pourriez-vous nous parler de votre parcours qui vous a conduit à travailler dans le domaine de la recherche spatiale ?

Raphaël Peralta : J’ai pris cette voie car j’ai toujours été fasciné par l’univers, les galaxies et les étoiles. Ce n’était pas un rêve de jeunesse comme certains pourraient l’avoir, mais plutôt un attrait irrésistible pour tout ce qui me semblait magique et un peu surnaturel dans le domaine de l’astrophysique.

J’ai suivi un cursus académique assez standard en sciences et me suis naturellement orienté vers la recherche en astrophysique pour ma thèse. Pendant mes études, j’ai eu l’opportunité de travailler sur les étoiles, plus spécifiquement via l’astérosismologie. Cette discipline étudie les étoiles en observant leurs vibrations internes, un peu comme on étudie la Terre avec les séismes.

J’ai pris cette voie car j’ai toujours été fasciné par l’univers, les galaxies et les étoiles.

Au fil de ma carrière, j’ai également travaillé sur le cosmos et les exoplanètes. Cependant, ce que j’ai découvert être ma véritable passion, c’est la recherche elle-même et la communication de cette recherche au grand public. C’est ce qui m’a amené à m’orienter vers la médiation scientifique. Pour partager cette passion et cet émerveillement, j’ai créé une association appelée Spacebus France. Nous allons directement vers les personnes pour leur parler d’astronomie.

Vous utilisez la réalité augmentée dans vos travaux en recherche spatiale, qu’est-ce qui vous a amené à faire ce choix ?

Raphaël Peralta : Je suis par ailleurs chargé de communication au sein du département d’astrophysique du CEA de Paris-Saclay. C’est là que j’ai rencontré des chercheurs qui voulaient valoriser leur travail sur les exoplanètes de manière ludique et moderne. Nous avons décidé de créer une application de réalité augmentée, car cette technologie permet d’attirer l’attention du public d’une manière très interactive. Les gens utilisent déjà beaucoup leurs smartphones donc l’adoption d’une telle application semblait naturelle pour la médiation scientifique.

Nous avons décidé de créer une application de réalité augmentée, car cette technologie permet d’attirer l’attention du public d’une manière très interactive.

Pourquoi avez-vous choisi spécifiquement la réalité augmentée pour communiquer sur vos travaux en recherche spatiale ?

Raphaël Peralta : En général, quand les gens pensent à l’univers, ils imaginent des images splendides de nébuleuses ou de galaxies, souvent rendues encore plus impressionnantes grâce à des télescopes comme James Webb. Toutefois, ces images demeurent en deux dimensions et paraissent assez lointaines et peu concrètes. La réalité augmentée offre un avantage en ce sens : elle permet de transformer ces images en trois dimensions avec lesquelles on peut interagir. Cela crée un environnement plus immersif, où l’on peut littéralement se balader autour de l’objet d’étude. C’est particulièrement important pour des objets qui sont, en temps normal, trop lointains ou abstraits pour que l’on puisse vraiment les « toucher ».

Ce niveau d’interactivité avec des objets habituellement hors de notre portée peut changer la façon dont nous les percevons. Même dans le domaine scientifique, il y a eu une période où l’on pensait que les exoplanètes, par exemple, n’existaient pas. Ce n’est qu’avec la découverte de la première exoplanète que les perceptions ont commencé à changer. La réalité augmentée permet de rendre ces concepts plus concrets.

Cela crée un environnement plus immersif, où l’on peut littéralement se balader autour de l’objet d’étude.

C’est particulièrement important pour les enfants, qui sont la cible principale de ce genre d’applications. Aujourd’hui, les écrans sont omniprésents dans la vie des jeunes, parfois même dès le plus jeune âge. Certains enfants semblent maîtriser l’usage des écrans tactiles mieux que beaucoup d’adultes. Par conséquent, nous utilisons cette familiarité avec la technologie pour les aider à s’approprier des concepts qui seraient autrement trop éloignés ou abstraits pour eux. La réalité augmentée donne la possibilité d’interagir avec ces objets lointains et complexes, rendant l’expérience d’apprentissage plus engageante et plus concrète.

Quelles ont été les réactions lors de l’utilisation de votre application de réalité augmentée et recherche spatiale ?

Raphaël Peralta : Au début, lorsque les gens essaient l’application pour la première fois, ils se demandent souvent comment ça fonctionne. Mais une fois qu’ils comprennent les bases, on peut observer un changement fascinant dans leur comportement. Ils commencent à s’émerveiller et à s’immerger vraiment dans l’expérience. Ce moment est particulièrement gratifiant à observer, car c’est là qu’ils commencent à tourner autour de l’objet, à zoomer dessus et à interagir avec lui de différentes manières. Ils sont complètement captivés par l’application, c’est extrêmement intéressant !

L’objet d’étude devient très rapidement le centre d’intérêt, et les utilisateurs parviennent à le manipuler avec aisance. L’efficacité de cette méthode d’engagement varie en fonction de l’âge des participants. Je trouve que cela fonctionne particulièrement bien avec les adolescents. Ils sont très engagés dans des sujets comme l’écologie et sont naturellement curieux. Cette combinaison les rend aptes à passer beaucoup de temps sur l’application, surpassant ainsi les difficultés ou les aspects peut-être plus austères de la science.

Ce qui est également intéressant, c’est l’aspect social de cette expérience. J’avais des réserves au départ concernant la possibilité que la technologie puisse réduire les interactions humaines. Cependant, ce que j’ai observé, c’est que les jeunes, notamment dans les écoles, se rassemblent souvent en petits groupes autour d’une même tablette ou d’un même dispositif pour explorer l’application ensemble. Ils commencent à se parler, à partager ce qu’ils trouvent intéressant, et à collaborer.

Ce niveau d’interaction sociale était une agréable surprise pour moi et a démontré que l’outil peut aussi servir à favoriser le travail en groupe et le partage des connaissances. C’est très satisfaisant de voir que non seulement l’application éduque, mais qu’elle crée également des opportunités pour des interactions sociales enrichissantes.

Avez-vous identifié des limites et des pistes d’amélioration de l’expérience utilisateur ? Que recommanderiez-vous à d’autres spécialistes de la recherche spatiale ?

Raphaël Peralta : Il y a en effet plusieurs pistes que l’on pourrait explorer pour améliorer l’expérience utilisateur en matière de réalité augmentée, tant du point de vue scientifique que du point de vue de la médiation. 

Premièrement, la réalité augmentée commence à être utilisée par les chercheurs eux-mêmes pour mieux comprendre et visualiser leurs données. J’ai des collègues qui ont développé des applications en réalité augmentée pour simuler des conditions sur Mars ou sur la comète Tchouri, par exemple. Ces applications utilisent plus précisément de la réalité virtuelle pour immerger totalement les utilisateurs dans ces environnements. Ce genre d’outil peut être extrêmement précieux pour la recherche scientifique, car il permet de voir les objets d’étude sous un nouveau jour, en trois dimensions.

La réalité augmentée commence à être utilisée par les chercheurs eux-mêmes pour mieux comprendre et visualiser leurs données.

En ce qui concerne la médiation, et plus précisément l’application que j’ai développée, je pense que l’utilisation des technologies complémentaires, comme des tablettes avec GPS intégré, pourrait enrichir l’expérience. Les tablettes modernes sont capables de suivre les mouvements des utilisateurs avec beaucoup plus de précision et de manière moins perturbable par des facteurs externes, comme le passage d’une autre personne dans le champ de vision. Cela pourrait permettre aux utilisateurs de « rentrer » dans l’objet d’étude, plutôt que de simplement le survoler. Ils pourraient, par exemple, explorer l’intérieur d’une cellule ou se déplacer à travers une galaxie, expérimentant ainsi un niveau d’interaction beaucoup plus profond.

Je pense que si mes collègues chercheurs pouvaient travailler sur ces aspects — l’immersion complète, l’interaction profonde avec l’objet d’étude et la précision du suivi des mouvements — cela pourrait fortement améliorer l’expérience utilisateur. De telles avancées nécessiteront bien sûr une adaptation constante à la technologie disponible, mais je pense qu’elles pourraient apporter des contributions significatives à la fois dans le domaine de la recherche scientifique et dans celui de la médiation scientifique.

Ces avancées pourraient apporter des contributions significatives à la fois dans le domaine de la recherche scientifique et dans celui de la médiation scientifique.

Vous avez un parcours polyvalent, comment envisagez-vous la suite de celui-ci ?

Raphaël Peralta : Après ma thèse sur les étoiles, j’ai poursuivi avec un post-doctorat sur la mission Euclid qui vient d’être lancée. Ensuite, j’ai exploré le domaine des exoplanètes. Normalement, on s’attend à ce qu’une personne se spécialise dans un domaine spécifique pour être embauchée par des institutions comme le CNRS ou le CEA. En choisissant d’explorer différents sujets, j’ai pris un risque professionnel, mais mon objectif n’était pas simplement de me spécialiser. Ce qui m’intéressait, c’était la recherche en astrophysique dans son ensemble.

Le fait d’avoir varié mes centres d’intérêt m’a permis de mieux vulgariser différentes thématiques et de comprendre les besoins de différentes communautés scientifiques. Par exemple, la mission Euclid est un nouveau satellite envoyé pour étudier l’univers, la matière noire et l’énergie sombre. Le satellite va cartographier de nombreuses galaxies lointaines, ce qui pourrait même permettre un jour de se promener virtuellement dans cet univers grâce à la réalité virtuelle.

Cela ne s’arrête pas là. Avec le télescope James Webb, nous pouvons maintenant étudier l’atmosphère des exoplanètes. Ces nouvelles technologies ont un rôle crucial à jouer, tant dans la médiation scientifique que dans la recherche elle-même. Même si beaucoup de chercheurs s’en tiennent encore à des méthodes traditionnelles, je suis convaincu que l’adoption des technologies immersives pourrait être extrêmement bénéfique pour la recherche en astrophysique.


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