Informatique : « Les entreprises sont souvent surprises par ce qu’un docteur peut leur apporter »

Informatique : « Les entreprises sont souvent surprises par ce qu’un docteur peut leur apporter »

post interview milan stankovic

Dans cet entretien, Okay Doc donne la parole à Milan Stankovic, docteur en informatique spécialisé dans la technologie d’information et fondateur de SEPAGE, une startup primée en technologie IA.

Pouvez-vous nous détailler les principaux résultats de vos recherches ?

J’ai principalement travaillé sur les bases de connaissances sous forme de graphes. Mais aussi sur la capacité des machines à interpréter les contenus des réseaux sociaux qui sont de plus en plus courts et faibles en sémantique (l’étude des différents sens des mots et du langage), comme des tweets ou des likes. Le but est de proposer des recommandations pertinentes aux utilisateurs.

Mes recherches démontrent que les machines peuvent, grâce à des connaissances formalisées sous forme de graphes, surprendre les humains de manière pertinente et même stimuler la sérendipité (le don de faire par hasard des découvertes fructueuses).

Vous avez quitté Belgrade et la Serbie pour effectuer votre doctorat en informatique en France. Pourquoi ce choix ?

Tous les grands scientifiques Serbes (Tesla, Milankovic…) ont fait leurs études à l’étranger. J’ai grandi dans une culture où sortir de sa zone de confort, connaître et vivre d’autres cultures et perspectives était presque considéré comme un devoir. Pour être légitime en tant qu’intellectuel il a fallu se dépasser.

Finalement, je ne sais pas si venir en France était un choix personnel. Ma famille a des liens avec la France. Le frère de ma grande mère était un grand militaire serbe et à l’époque de la Seconde Guerre mondiale, il a rejoint le mouvement du Général de Gaulle. Il a ensuite vécu en France.

Mes parents voulaient que j’apprenne le français et il semblait naturel que j’obtienne la bourse du gouvernement français pour poursuivre mes études ici. Cette bourse existe depuis la nuit des temps et de célèbres artistes et intellectuels serbes en ont bénéficié. Il ne fallait pas la rater.

Par la suite j’ai choisi de rester à Paris et je l’assume. Grâce à ma carrière, j’ai eu des opportunités de partir ailleurs, à des endroits prestigieux. Mais je m’y plais ici, dans la capitale. Dans cette ville il y a quelque chose de chaotique et en même temps décisif. Quelque chose de difficile et en même temps noble. Quelque chose qui me ressemble.

Vous avez été chercheur et directeur scientifique pour la société Hypsios qui fournit aux entreprises un réseau mondial de talents en R&D. Selon vous, pourquoi est-ce important de rapprocher le monde de la recherche de celui de l’entreprise ?

Je crois qu’il y a un seul et unique monde, pour l’instant au moins, et jusqu’à preuve du contraire. L’humain veut toujours plus. Nous n’acceptons pas de vivre aujourd’hui comme nous avons vécu hier, ou comme nos ancêtres avaient vécu. Les entreprises doivent toujours proposer des nouvelles choses, pour vendre, pour rester compétitifs.

En informatique, particulièrement, des très grandes inventions proviennent de la recherche privée, faite dans des centres R&D des entreprises. Je pense à Xerox PARC où des grandes avancées ont été faites dans des années 70 sur les sujets des interfaces graphiques que nous utilisons encore aujourd’hui. L’idée que les entreprises ne font pas de la recherche est un oxymore relativement récent qui ne cesse de m’amuser. 

Cette vision très polaire d’un monde où ceux qui entreprennent et ceux qui font de la recherche ne sont pas les mêmes est très loin de la réalité. Elle présente surtout un danger et un risque d’effondrement de notre économie pour laquelle les deux sont indispensables.

En 2013 vous fondez la startup SEPAGE, quel était votre objectif ? Qu’avez-vous pu accomplir ?

J’avais plusieurs objectifs. Je voulais surtout que mes recherches voient une application dans la vie des gens, qu’elles impactent le quotidien des utilisateurs. Nous avons obtenu des résultats spectaculaires. Nous sommes parvenus à recommander des voyages pertinents à un utilisateur à peine connu.

Et ce, alors que les systèmes de recommandation de l’époque avaient besoin d’un historique de navigation cinq fois plus riche. Nous avons gagné des prix de meilleure innovation technologique dans le tourisme.

Mais, si je suis sincère, je voulais aussi faire mes preuves en tant qu’entrepreneur. Créer une start-up, la développer, et la vendre. Voir le cycle entier. C’était presque comme une deuxième thèse. J’avais besoin de m’affirmer en tant qu’entrepreneur.

Selon vous, quelle valeur ajoutée un docteur en informatique peut-il apporter à une entreprise ?

Je connais beaucoup de docteurs qui travaillent dans des entreprises. Mon impression est que les entreprises sont souvent surprises par ce qu’un docteur peut leur apporter. Faire une thèse nous amène à développer une autonomie, à surmonter des très grands défis et surtout à faire face aux incertitudes. Ce sont des qualités qui peuvent propulser une entreprise vers de nouveaux horizons. 


Par Léo Olivieri, journaliste web et responsable de la newsletter Back To Science chez Okay Doc.



À propos de Okay Doc

Startup innovante, Okay Doc fait correspondre l’expertise des ingénieurs et des chercheurs (doctorants ou Phd) aux besoins opérationnels des organisations quelles que soient leur taille : Notre expérience nous permet d’offrir un service clé en main : sourcer, sélectionner et coordonner les chercheurs dans différentes disciplines pour réaliser un état des lieux de vos problématiques et les résoudre en s’appuyant sur l’expérience et des méthodologies universitaires innovantes.


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