Empowerment : “Je crois fortement en la médiation scientifique par le théâtre”

Empowerment : “Je crois fortement en la médiation scientifique par le théâtre”

Empowerment: “Je crois fortement en la médiation scientifique par le théâtre”

Sa première pièce de théâtre, la soutenance de thèse, le concept d’empowerment… Marie-Georges Fayn, Dr/Phd en sciences de gestion et management se livre pour Okay Doc dans notre entretien.

Inspirée de sa propre expérience, Marie-Georges Fayn présente sa première pièce de théâtre sur le doctorat. Elle est accompagnée de Murièle Agherman et Deen Abboud, les comédiens qui jouent les rôles de l’inventeur à succès, du doctorant prêt à tout sacrifier pour sa thèse ou encore des consommateurs. Ceux qui se sentent perdus vis-à-vis de la science, qui la subissent.

Expliquez-nous ce choix du théâtre pour aborder le thème du doctorat

L’écriture académique d’une thèse est accompagnée de beaucoup de contraintes, notamment d’écriture. J’ai eu besoin de me libérer de ces contraintes une fois ma thèse soutenue. Je trouve que le théâtre est extrêmement plus libérateur que d’écrire simplement un texte ou même un roman. J’aimerais diffuser la pièce dans les universités car je crois fortement en la médiation scientifique par le théâtre. Il faut lever le tabou. J’ai été beaucoup aidé par Murièle Agherman et Deen Abboud, les deux comédiens, pour la mise en scène. Il y a eu cette entente et cette compréhension qui ont permis de vulgariser au maximum le sujet.

J’ai écrit la pièce en 3 mois, à partir de novembre 2019. Laurence Verger, une amie, a effectué une relecture approfondie et nous avons travaillé pendant 6 mois sur la mise en scène pendant la Covid. En septembre 2020 nous étions prêts, tout était complet. C’était encore la période faste du théâtre. Ensuite le deuxième confinement est arrivé et a changé la donne : l’apparition du pass sanitaire, l’expansion de Netflix qui est maintenant un gros concurrent et puis le repli sur soi et sa famille. C’est difficile de redonner goût au spectacle vivant !

Vous étiez directrice d’une agence de communication dans le domaine de la santé avant de soutenir votre thèse en 2019. À plus de 50 ans, qu’est-ce qui a motivé cette décision ?

Quand on est en fin de carrière, on a tendance à se laisser descendre tranquillement du haut du toboggan pour aller vers la sortie. Moi je ne suis pas comme ça, pas du tout. Dès lors que vous suivez une carrière professionnelle, vous vous rendez compte que certaines choses sont pré-organisées d’une manière que vous ne maîtrisez pas. Vous êtes dans le système. Mais comment fonctionne-t-il ? On ne sait pas… Le choix de faire une thèse m’est venu lorsque je travaillais dans la communication. À l’époque, je m’intéressais à l’intégration de plus en plus fréquente des malades dans le champ de l’organisation des soins. Depuis les années 70 – 80, ils ont appris à s’organiser entre eux, à faire front commun pour lutter contre l’ostracisme, l’injustice, l’absence de réponse et pour défendre ensemble leurs droits. 

Ils se sont regroupés, ont développé eux-mêmes des solutions ou influencé l’opinion publique pour faire avancer leur cause, et saisi le pouvoir politique pour transformer la loi. Désormais certains d’entre eux siègent au conseil administratif de leur entreprise. Plus de 167 associations de patients sont agréées au niveau national, mais il en existe bien plus. D’une fragilité individuelle, ces personnes ont réussi à en faire une force collective. J’ai voulu comprendre vraiment ! Les livres et les documents que j’explorais ne me suffisaient pas. Une thèse, ça permet de bien saisir les problématiques parce qu’on part de très loin.

Pendant toutes ces années, je voyais monter le pouvoir des patients et des citoyens. Il fallait que j’analyse ce système parce que la démocratie est menacée. C’est un renouveau, une vitalité collective et civique que l’on ne retrouve pas dans le champ politique. Alors je me suis assise sur les bancs de la fac avec d’autres doctorants tous beaucoup plus jeunes que moi. C’est là que j’ai compris que les seniors avaient aussi beaucoup de choses à apporter à la fac. On a un regard à 360° en étant à la fois en études et dans la vie active. Notre réseau nous aide et on travaille un peu plus vite car on a l’habitude de présenter des stratégies par exemple. Cela dit, il est vrai qu’on peut être un peu plus difficile à coacher !

« […] Lorsque l’on est sans solution et que la société ne peut nous aider, il est possible de transformer cet état en une force collective ».

Marie-georges fayn

Vous avez créé l’organisation citoyenne Selfpower Community avec ce concept d’empowerment. En quoi cela consiste-t-il ?

Aujourd’hui je suis professeure à l’École des hautes études en santé publique, l’EHESP. Je donne des cours sur le marketing de la santé et sur le principe de l’empowerment. Pour faire simple, il s’agit d’étudier comment à partir d’une vulnérabilité individuelle, lorsque l’on est sans solution et que la société ne peut nous aider, il est possible de transformer cet état en une force collective. Par quel moyen ? Cela commence avec les réseaux sociaux : un témoignage appelle souvent d’autres témoignages. De là, se construit une communauté qui diagnostique les dysfonctionnements du système et cherche des solutions en fonction des ses besoins communs. C’est à partir de ça que sont posées des questions de société et des réformes sont envisagées.

Je prends toujours l’exemple de l’AFM-Téléthon, cette association qui lutte contre les myopathies. Cela part d’un père à qui on a dit qu’il n’y avait plus rien à faire pour soigner son fils atteint d’une myopathie. Mais lui a entendu “il y a tout à faire”. Il a donc rencontré les parents d’enfants malades pour voir comment ils vivaient la situation. En s’inspirant du concept américain, ils ont importé le Téléthon en France en 1987. Le chemin parcouru par l’association est impressionnant. Elle est passée des malades vulnérables isolés à la création d’un laboratoire pharmaceutique en biomédicaments non-chimiques et issus du vivant, qui sont les plus compliqués à fabriquer.

Êtes-vous déjà intervenue en entreprise ? Comment pourrait-on y introduire cette notion d’empowerment ?

Je n’ai pas encore eu cette chance. Avec la préparation de la pièce, le temps m’a manqué. C’était littéralement un marathon. Cependant j’aimerais beaucoup le faire car en entreprise on nous donne une certaine liberté, avec une plus grande autonomie et la possibilité de prendre part aux décisions… jusqu’à un certain point. Ce qui m’intéresse c’est d’analyser comment bien répartir le pouvoir dans ce périmètre prédéfini qu’est l’entreprise. Le but n’est pas de faire un travail répétitif et abrutissant en introduisant le sujet par “aujourd’hui nous allons faire de l’empowerment ».  

Je trouve que présenter un exposé qui débouche sur un débat est une méthode efficace : on rapporte les choses par rapport à sa situation personnelle et on les confronte avec les enjeux stratégiques et avec la responsabilité sociale de l’entreprise. La démarche d’empowerment oblige à repenser la gouvernance à tous les niveaux de la hiérarchie. Se pose alors la question des limites de l’émancipation ? Jusqu’où ira la délégation de pouvoir ? Ce genre de confrontation ouvre la voie à une nouvelle culture organisationnelle c’est l’occasion de réinventer ou plutôt de renégocier le pouvoir en commun ».


Par Léo Olivieri, journaliste web et responsable de la newsletter Back To Science chez Okay Doc



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