Maladie d’Alzheimer : où en est la recherche en 2023 ?
À l’occasion de la Journée mondiale Alzheimer 2023, Okay Doc interroge aujourd’hui les Dr. Maï PANCHAL, Directrice Générale et Scientifique de la Fondation Vaincre Alzheimer, et Marion LEVY, Responsable Etudes & Recherche de la Fondation Vaincre Alzheimer, reconnue d’Utilité Publique. La Fondation a récemment présenté son Rapport 2023 de la recherche médicale sur la maladie d’Alzheimer.
Liste des questions
La Fondation Vaincre Alzheimer a récemment présenté son Rapport 2023 de la recherche médicale sur la maladie d’Alzheimer. Pouvez-vous nous dire quelles avancées majeures ont été réalisées depuis la création de la Fondation en 2005 ?
Maï Panchal et Marion Levy : Depuis la création de la Fondation Vaincre Alzheimer, des avancées majeures ont vu le jour, notamment au niveau de l’imagerie. En effet, il est maintenant possible de détecter de façon précise et sensible les dépôts amyloïdes dans le cerveau des patients Alzheimer. La détection de la protéine tau toxique, bien qu’utilisée encore dans le cadre de la recherche, est désormais également possible.
Ces techniques ont ainsi permis d’en apprendre davantage sur la progression biologique de la maladie.
Par ailleurs, la découverte des autres voies affectées dans la maladie a également permis de mieux comprendre les causes de la pathologie. L’implication de la génétique, du métabolisme cellulaire, mais aussi du système vasculaire sont des nouvelles pistes de recherche prometteuses qui devraient aider à mieux identifier les mécanismes sous-jacents qui amènent au développement de la maladie. Ces dernières découvertes ont permis de conclure qu’il sera probablement nécessaire de développer une multi thérapie pour stopper l’évolution de la maladie. Ainsi, la recherche clinique s’oriente maintenant vers des molécules visant d’autres cibles thérapeutiques, voire ciblant plusieurs voies.
L’implication de la génétique, du métabolisme cellulaire, mais aussi du système vasculaire sont des nouvelles pistes de recherche prometteuses qui devraient aider à mieux identifier les mécanismes sous-jacents qui amènent au développement de la maladie.
Le donécopride en est un exemple. En effet, cette molécule à pluralité d’actions a été mise au point par l’équipe du Dr Dallemagne (Caen), en collaboration avec le laboratoire du Dr Claeysen (Montpellier), grâce au financement de la Fondation Vaincre Alzheimer. Cette molécule permettrait à la fois un bénéfice symptomatique mais aussi aurait un rôle protecteur sur les neurones.
Aujourd’hui, quels sont les défis principaux auxquels les chercheurs font face dans leur quête pour comprendre et traiter la maladie d’Alzheimer ?
Maï Panchal et Marion Levy : Une des premières raisons va être la complexité de la maladie. Dans notre rapport, nous illustrons toutes les voies potentiellement affectées par la maladie d’Alzheimer. La recherche s’est longtemps concentrée sur les deux lésions principales de la maladie d’Alzheimer, les dépôts amyloïdes et les dégénérescences neurofibrillaires, mais d’autres voies sont également impactées. Les récentes avancées sur l’implication de la neuroinflammation en est un exemple.
Il est important de souligner également l’hétérogénéité de la maladie. En effet, cette pathologie se manifeste différemment d’un individu à l’autre au niveau des symptômes, mais il existe également des différences qui sont en lien avec les facteurs de risque génétique et le sexe.
Il est important de souligner également l’hétérogénéité de la maladie.
Outre les aspects scientifiques, tous ces défis sont d’autant plus affectés par le manque de moyens alloués à la recherche et ceci est d’autant plus important en France. En effet, l’absence de crédits récurrents aux équipes entraîne la nécessité de chercher des fonds propres pour financer les projets, les étudiants doctorants et les jeunes chercheurs post-doctorants. Cette recherche de fonds propres est extrêmement chronophage tout en étant très compétitive pour les chercheurs. Il y a en effet beaucoup de demandes de candidatures pour un taux de succès souvent trop faible. Par ailleurs, sans l’aide des associations et des fondations, comme la Fondation Vaincre Alzheimer, les chercheurs ne pourraient pas développer des projets de recherche innovants et recruter de jeunes chercheurs.
Pouvez-vous partager les principales pistes de recherche actuelles pour comprendre les mécanismes sous-jacents de la maladie d’Alzheimer ?
Maï Panchal et Marion Levy : Actuellement, les scientifiques se concentrent sur 7 principales pistes de recherche. Il y a, bien évidemment, l’étude de l’accumulation des deux protéines toxiques bêta-amyloïde et tau mais également d’autres voies impactées dans la maladie telles que la neurotransmission (échanges chimiques entre les neurones pour, entre autres, transmettre une information), la neuroinflammation, la neuroprotection, le métabolisme cellulaire et le système vasculaire. L’étude des facteurs de risque génétique fait également partie des pistes de recherche en plein essor.
Quelles ont été les dernières découvertes sur la maladie d’Alzheimer ?
Maï Panchal et Marion Levy : Une des dernières avancées majeures porte sur la propagation de la maladie d’Alzheimer. En effet, les protéines toxiques ont cette capacité à transmettre leur pouvoir toxique d’une structure cérébrale à une autre, se propageant ainsi à l’ensemble du cerveau. L’étude du corps dans sa globalité pour comprendre la maladie a également permis de formuler de nouvelles hypothèses comme l’implication du microbiote intestinal dans le développement de la pathologie. Et enfin, les résultats prometteurs des 2 dernières immunothérapies anti-amyloides (le lecanemab et le donanemab) ont montré qu’éliminer les dépôts amyloïdes pouvait avoir un impact dans le ralentissement du déclin cognitif lié à la maladie, même si ces traitements ne permettent pas d’arrêter complètement sa progression.
Maladie d’Alzheimer : comment votre Fondation a-t-elle pu influencer le développement de ces nouvelles pistes de recherche ?
Maï Panchal et Marion Levy : Outre le candidat-médicament Donécopride mentionné plus haut, la Fondation Vaincre Alzheimer a investi plus de 9 millions d’euros dans la recherche médicale depuis sa création en 2005, permettant à 232 projets de recherche de voir le jour. Ce soutien conséquent à la recherche médicale a permis de participer à de nombreuses grandes avancées de la recherche médicale sur la maladie d’Alzheimer, telles que l’identification de nouveaux facteurs de risque génétique et métabolique, l’étude de la propagation de la maladie d’Alzheimer et la découverte de futures nouvelles cibles thérapeutiques.
Ce soutien conséquent à la recherche médicale a permis de participer à de nombreuses grandes avancées de la recherche médicale sur la maladie d’Alzheimer.
La Fondation Vaincre Alzheimer investit également dans la recherche sur le diagnostic précoce, comme le projet du Prof. Payoux soutenu à hauteur de 866.191 € qui vise à développer une nouvelle méthode de diagnostic basée sur l’imagerie cérébrale et l’oculométrie (mesures dynamiques de la pupille) pour diagnostiquer la maladie d’Alzheimer dans sa phase silencieuse.
👉 Okay Doc : Pour en savoir plus sur la maladie d’Alzheimer de manière plus spécifique, n’hésitez pas à faire appel aux conférences de Marie Tautou, conférencière en neurosciences chez Okay Doc et spécialisée dans cette maladie.
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