Forum BiotechnoSUD : interview avec Laurine Binet, l’une des organisatrices
Cette semaine, Okay Doc interroge Laurine Binet, doctorante en immunologie au Centre d’Immunologie de Marseille-Luminy (CIML). Elle a participé à l’organisation de l’édition 2022 du Forum BiotechnoSUD à Marseille, et nous montre à quel point la recherche dans le privé devient de plus en plus incontournable, l’importance du réseau professionnel pour un docteur et les différentes retombées de l’événement.
Liste des questions
Pourquoi avoir lancé le Forum BiotechnoSUD et quels sont ses objectifs ?
Le forum s’adressait à tous les jeunes scientifiques du domaine de la santé souhaitant s’informer sur les différentes possibilités après un Master, une Thèse, un Post-Doctorat… Et nous sommes ravis d’avoir pu accueillir des personnes de différents horizons, provenant de différents Masters, ou étant en thèse, ingénieur ou post-doctorant.
L’objectif du forum était double. Bien sûr, ce qui transparaît le plus, c’est d’informer les masters et thésards sur les possibilités de poursuite de carrière et de les accompagner en leur présentant différents pans du monde scientifique de la région Sud. Cependant, nous avions aussi pour objectif de favoriser les interactions dans tous les sens possibles. Que ce soit au niveau des interactions entre demandeurs de stage ou d’emploi avec ceux qui peuvent en proposer, ou même au niveau des interactions scientifiques. Les jeunes scientifiques qui étaient présents au forum constituent la génération de demain, et il est primordial d’entretenir et de continuer à construire ce réseau scientifique et de le rendre accessible aux générations futures.
Est-ce que le fait que vous soyez vous-même docteure a influencé la manière dont vous avez organisé le Forum BiotechnoSUD ?
Oui, en grande partie même. Notre équipe est composée de personnes occupant différents postes : ingénieurs et thésards. Nous en sommes tous arrivés au même constat : il y a un flou total autour de toutes les possibilités après un master ou une thèse. On nous présente souvent que LA route à suivre à la fac est celle de la licence, puis le master, puis une thèse et des post-docs pour faire chercheur. Mais en réalité, il y a toute une variété de métiers qui travaillent main dans la main pour permettre l’émergence et le maintien de nouveaux savoirs et savoir-faire.
Dans quelle mesure le réseau est-il important pour son projet professionnel, notamment pour les doctorants ?
Créer un réseau, c’est créer des passerelles entre des personnes de différents milieux, de différentes thématiques. Comme c’est le cas en Sciences, la collaboration est très importante, que ce soit un échange d’idées autour d’un café ou un projet en commun, et on le voit tous les jours au laboratoire. Il n’y a pas une semaine sans qu’on ait besoin des autres, de communiquer, d’échanger. Se constituer un réseau, c’est permettre de maintenir cet échange à plus long terme et de manière plus diversifiée. À travers le réseau, on peut facilement avoir des réponses à des problématiques auxquelles personne dans notre environnement de travail n’avait de solution.
Et c’est encore plus important pour les doctorants, car quand on devient doctorant, on est en réalité encore en apprentissage et c’est d’ailleurs pour cela que l’on est appelé « étudiant en thèse ». Mais in fine, nous sommes amenés à devenir des scientifiques à part entière et c’est cette finalité qui constitue notre objectif, que ce soit pour aller dans le privé ou le public. Avoir un réseau, c’est donc l’opportunité de communiquer son travail, mais également de pouvoir garder contact avec des personnes qui pourraient par la suite nous intéresser pour travailler et être intéressées par notre profil.
En quoi la recherche dans le privé est-elle importante et innovante ?
La recherche dans le privé est primordiale car elle est complémentaire de la recherche dans le public. Dans un premier temps, les moyens alloués sont plus importants, et permettent parfois d’accéder à des études et des technologies qui ne sont pas possibles dans le public. D’autre part, on retrouve de nombreux exemples de collaborations public-privé, qui permettent d’accentuer une recherche, voire de rendre possible des retombées au niveau de la santé des Français (on en voit l’exemple avec les immunothérapies, pour ne citer qu’une retombée).
Les chercheurs en biotechnologies sont-ils de plus en plus recherchés par les entreprises ? Si oui, dans quelles spécialités ?
Ce n’est pas tant au niveau des chercheurs, mais au niveau des scientifiques que les besoins se font ressentir. De plus en plus d’entreprises sont à la recherche de personnes ayant fait une thèse avec un post-doctorat sans pour autant être chercheurs afin de mener des projets. Les spécialités sont diverses, et dépendent du sujet sur lequel est portée l’entreprise. En revanche, des qualités et spécificités sont requises comme la maîtrise d’une technique, la capacité de gestion d’un projet, …
Un doctorant ou docteur peut-il être un bon entrepreneur ?
Pour répondre à cette question, il faut déjà définir ce que signifie être entrepreneur. Pour moi, cela signifie d’une personne qu’elle possède les ressources (financières et morales) pour pouvoir lancer une activité et la maintenir. On peut un peu faire le parallèle avec un directeur d’équipe dans ce cas, ou à plus petite échelle à un porteur de projet. Dans ce cas, les objectifs définis doivent comprendre un investissement personnel et matériel et une capacité de leadership pour manager des équipes. La première partie, c’est quelque chose auquel on est confronté en thèse car notre objectif est d’apprendre à mener un projet.
Cependant, pour la question de capacité de leadership, cela requiert à mon sens des notions de management et de gestion des relations humaines. Ainsi, pour qu’un doctorant ou un docteur soit un bon entrepreneur, il possède certaines des capacités requises, mais a besoin de se former quand même à certains aspects primordiaux au bon fonctionnement d’une équipe.
Quelles ont été les retombées du Forum BiotechnoSUD pour les étudiants et doctorants ?
Nous avons eu beaucoup de retours de la part de différentes personnes, que ce soit des personnes qui nous étaient totalement inconnues, ou bien des personnes de notre entourage professionnel. D’après ces retours, le forum a eu un franc succès et a répondu à beaucoup de questions sur les poursuites de carrière et leurs différentes modalités pour réussir au mieux. D’ailleurs, nous avons pu recenser 230 participants, 80 intervenants professionnels avec 18 stands.
Ce forum a notamment permis de mettre en lumière différentes voies qui n’étaient pas forcément visibles lorsqu’on est étudiant, et ce grâce à toutes les personnes qui nous ont répondu positivement pour participer à cette première ré-édition et sans qui ce forum n’aurait pas pu se tenir. De plus, les différents ateliers ont permis de répondre plus en détail à des questions que les participants se posaient. Enfin, les stands ont permis de favoriser les interactions et nous remercions vivement les personnes s’étant rendues disponibles pour les animer, ainsi que les personnes ayant animé les stands de correction de CV qui ont largement été assaillis.
Face à l’importance de ce forum, il est sans nul doute que nous prévoyons de le pérenniser, et pour cela, encore une fois, le réseau sera primordial afin de faire vivre cette promesse d’interactions à travers les différentes promotions d’étudiants et de jeunes scientifiques.
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