Être chercheur et entrepreneur, c’est possible !

Être chercheur et entrepreneur, c’est possible !

Valentin Joannet, chargé de la Sensibilisation et de l’Accompagnement des Jeunes Chercheurs Entrepreneurs au Centre d'Entrepreneuriat Lyon Saint-Etienne

La recherche et l’entrepreneuriat : des compétences complémentaires pour créer des synergies inattendues ! Découvrez dans cette interview de Valentin Joannet (chargé de la Sensibilisation et de l’Accompagnement des Jeunes Chercheurs Entrepreneurs au Centre d’Entrepreneuriat Lyon Saint-Etienne) les raisons pour lesquelles être docteur/chercheur et entrepreneur est non seulement compatible, mais bénéfique pour ces deux mondes.

Les chercheurs ont en eux une graine d’entrepreneur prête à être développée, et les démarches de recherche et d’entrepreneuriat ont des similitudes qui peuvent paraître étonnantes. Cette interview offre une perspective sur l’innovation et la valorisation de la recherche en France.

Pouvez-vous nous décrire votre parcours universitaire et professionnel ?

Il s’est construit en très grande majorité sur la base de choix par défaut. Après un bac général scientifique, je me suis orienté vers une classe préparatoire MPSI/PSI (math sup/math spé) sans trop savoir pourquoi, comme beaucoup de bacheliers qui ont de bonnes notes au lycée. À l’issue des concours d’entrée en école d’ingénieurs, j’ai intégré l’ENSTA Bretagne, situé sur le campus de Brest et poursuivi une formation en architecture des véhicules, choix guidé par mon désintérêt pour l’informatique, plus que par amour pour la mécanique…

Paradoxalement, c’est en dehors des murs de l’école que le déclic s’est fait pour mon parcours professionnel. Lors d’un semestre d’échange à Polytechnique Montréal, j’y ai découvert l’innovation et l’entrepreneuriat avec une approche bien différente de celle à laquelle nous sommes accoutumés en France. À mon retour, j’ai donc décidé de suivre une formation en entrepreneuriat pour compléter ma formation d’ingénieur, ce qui m’a permis d’accéder à mon poste actuel.

Aujourd’hui, je suis impliqué sur des actions de sensibilisation à l’entrepreneuriat auprès des jeunes chercheurs au sein du Centre d’Entrepreneuriat Lyon Saint-Etienne, porté par l’Université de Lyon, et plus généralement au sein du réseau national Pépite et sa cellule Pépite PhD. Le comble, pour quelqu’un qui n’est pas docteur et qui n’a jamais créé d’entreprise… L’idée n’est pas de dévaloriser mon parcours ici mais bien de montrer que les actions menées sur le terrain apportent bien plus de légitimité que les diplômes obtenus en amont.

Qu’est-ce que le Centre d’Entrepreneuriat Lyon Saint-Etienne ? Quel y est votre objectif principal ?

Le Centre d’Entrepreneuriat Lyon Saint-Etienne est un dispositif de l’Université dont le cœur de métier est d’accompagner l’ensemble des étudiants et jeunes diplômés à la création de toute activité économique (startup, entreprise, association, micro-entreprise, projets culturels, …), quel que soit leur niveau d’études et l’avancement de leur projet. Nous faisons partie du réseau Pépite, qui regroupe 32 autres structures similaires implantées dans les autres écosystèmes universitaires en France et qui œuvrent pour sensibiliser à l’entrepreneuriat les étudiants du supérieur du baccalauréat jusqu’au doctorat.

L’objectif n’est pas tant de créer des entreprises (c’est une conséquence positive, mais ce n’est pas une finalité) mais bien de faire monter en compétences les étudiants et jeunes diplômés afin que ces derniers acquièrent une posture d’entrepreneur utile à toute orientation professionnelle.

On a souvent tendance à l’oublier mais lorsque l’on parle d’étudiants et de jeunes diplômés, on parle aussi de doctorants et de jeunes docteurs. Ce sont des profils particuliers car ce sont aussi des professionnels : compte tenu de ces spécificités, les Pépite ont développé des actions de sensibilisation dédiées à ce public cible, et notamment via des missions comme la mienne.

Être docteur / chercheur et entrepreneur, c’est compatible ?

Évidemment, sinon les missions comme la mienne n’existeraient pas. De nombreux docteurs, issus de toutes les disciplines scientifiques, ne nous ont d’ailleurs pas attendu pour être entrepreneurs : Voilà des exemples de portraits que l’on peut trouver parmi tant d’autres !

Plus qu’une compatibilité, les chercheurs ont déjà en eux une graine d’entrepreneur qui n’attend que d’être développée. En effet, le doctorat, bien au-delà de l’expertise scientifique, permet de développer des compétences très proches de celles utilisées par les entrepreneurs : la créativité, l’innovation, la communication, la persévérance, la gestion de projet, le travail en équipe, …

De plus, l’entrepreneuriat et la recherche ont des démarches très similaires : il s’agit dans les deux cas de faire des hypothèses, de les tester sur le terrain et de les réadapter avec une démarche itérative. Si cela ne semble pas évident au premier abord, c’est avant tout parce que les deux mondes ont développé, indépendamment de leur côté, un vocabulaire et un jargon qui leurs sont propres, alors qu’ils désignent parfois une même réalité. Pour ne citer qu’un exemple : Un état de l’art (monde de la recherche) et une analyse de la concurrence (monde de l’entrepreneuriat) renvoient à une démarche comparable.

Comment percevez-vous le rapport entre la recherche et le monde de l’entreprise en France ?

Cela n’est peut-être pas flagrant en France, mais la recherche et le monde de l’entreprise s’alimentent mutuellement, ils fonctionnent en synergies. Contrairement aux idées reçues, l’entreprise n’est pas là pour « extirper » les idées de la recherche et les commercialiser à des fins diaboliques : elles proposent de trouver un marché pour les solutions générées et donc de les rapprocher de potentiels utilisateurs. À l’inverse, les entreprises sont d’excellents terrains d’étude pour la recherche en plus d’apporter une source de financement complémentaire aux ressources publiques.

Il est donc important de créer des passerelles entre ces deux mondes sans pour autant altérer leur nature respective.

En quoi est-il important d’accompagner les chercheurs à être entrepreneurs ?

En dépit d’un socle de compétences solides, la transition d’une posture de chercheur à celle d’un d’entrepreneur n’est pas aussi aisée. En effet, cela nécessite d’évoluer dans un paradigme différent dans lequel les notions de temporalité et de ressources (notamment financières) sont assez particulières.

Par exemple, un doctorant a 3 ans pour faire une thèse pour laquelle un budget est dédié et souvent déterminé à l’avance (même si ce n’est pas toujours le cas !), dans le but de produire des résultats espérés. À l’inverse, un entrepreneur n’a que très peu de ressources au démarrage et se projette plus en mois qu’en années : il est de son ressort de produire des résultats qui lui permettront de décrocher des financements et de fixer des jalons qui lui permettent de réévaluer le projet. Les entrepreneurs raisonnent alors en termes de « pertes acceptables » : « Combien de temps, d’argent, suis-je prêt à perdre pour que mon projet réussisse ? »

C’est en cela qu’il est essentiel d’être accompagné et notamment au sein des Pépite, car ces derniers investissent leur argent sur ce changement de posture, à défaut de pouvoir le dépenser sur vos projets. Certaines structures, comme les SATT (Société d’Accélération du Transfert de Technologies), permettent de couvrir le risque associé aux pertes acceptables, en apportant des financements à vos projets, à condition que ces derniers reposent sur la valorisation de vos résultats de recherche.

Comment les sensibilisez-vous à l’entrepreneuriat ?

Ces trois dernières années, de très nombreuses actions de sensibilisation ont été développées au sein du réseau Pépite. La dernière en date : Les Quizz & Talk, une émission Twitch en format « talk show » avec des invités du monde de la recherche et de l’entrepreneuriat qui s’affrontent sur une série de 3 mini-jeux (Les replays de la première saison sont disponibles ici alors que la deuxième saison est au four…). Un autre exemple : un module « entrepreneuriat » au sein du MOOC PhDOOC qui informe chaque année près de 5000 doctorants à l’évolution professionnelle.

En parallèle de ces formats originaux, nous intervenons quotidiennement au sein des écoles doctorales et laboratoires afin de proposer un certain nombre de formations dites transversales pour permettre aux doctorants de libérer de leur temps pour monter en compétences sur les sujets relatifs à l’entrepreneuriat et à l’innovation.

De manière générale, nous essayons de faire témoigner le plus possible des docteurs entrepreneurs en mettant en avant la diversité des trajectoires : il est important de montrer qu’il n’existe pas de voie unique et qu’il est libre à chaque chercheur de créer la sienne.

Auriez-vous quelques conseils à destination de personnes issues de la recherche voulant se lancer dans l’entrepreneuriat ?

Il est commun, a fortiori pour les chercheurs, de garder son idée pour soi par peur de se la faire voler. Le meilleur conseil que je peux donner aux chercheurs qui souhaitent se lancer est, au contraire, d’en parler au plus de monde possible. Il s’agit du meilleur moyen pour l’alimenter et la mettre en œuvre car le biais de sa réflexion personnelle est souvent décorrélé de la réalité du marché : une idée/une solution, aussi bonne soit-elle, ne garantit en rien que des personnes souhaitent l’adopter.

Pour faire simple : faites-vous accompagner !


À propos de Okay Doc

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One Response

  1. […] L’entrepreneuriat et la création d’entreprise sont des voies de plus en plus populaires pour les docteurs. Leurs compétences en recherche, en résolution de problèmes et en gestion de projets leur permettent de transformer leurs idées novatrices en réalité. Les soft skills acquises avec un doctorat, telles que la pensée critique, la créativité, la communication efficace et la persévérance, sont des atouts précieux pour devenir un entrepreneur prospère. Il est donc possible de faire de très beaux projets innovants avec un doctorat. […]

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