Comprendre la diversité pour un meilleur vivre-ensemble au travail

Comprendre la diversité pour un meilleur vivre-ensemble au travail

Article Benjamin pastorelli okaydoc

Que ce soit dans un but moral, pour augmenter la performance ou pour atteindre une meilleure qualité de vie au travail, le vivre-ensemble est devenu un enjeu majeur de nos entreprises et plus largement de nos sociétés. Vivre et travailler dans la différence apporte des difficultés, mais c’est une véritable promesse de réussite.

La diversité est un phénomène complexe et a des effets ambivalents sur le fonctionnement des équipes de travail. En saisir l’ampleur est une étape essentielle vers la construction du vivre-ensemble. Pour développer ce dernier des leviers d’action existent, à tous les niveaux de l’entreprise. Voyons la complexité d’abord et ces leviers ensuite.

La complexité de la diversité

Une « double-edged sword », une épée à double tranchant, c’est ainsi que Frances Milikens et Luis Martins, chercheur.e.s en comportement organisationnel, qualifient la diversité [1]. Celle-ci n’a pas un effet global sur le fonctionnement des équipes de travail qui serait soit forcément positif, soit forcément négatif. Son effet est double : positif et négatif [2 ; 3].

D’un côté, la diversité amène une richesse d’idées et de points de vue, de connaissances et de visions du monde. Cette variété dans les informations disponibles dynamise le travail et stimule ce que les psychologues appellent « l’élaboration de l’information ». Cette dernière augmente la performance et la créativité des équipes, la productivité et l’innovation des entreprises.

D’un autre côté, la diversité favorise la « catégorisation sociale », notre tendance naturelle à classer les gens que nous rencontrons entre ceux et celles qui sont comme nous, et ceux et celles que ne le sont pas. Sous certaines conditions, ce processus crée des dissensions au sein de l’équipe et trouble le bon déroulement de son travail.

Ces deux faces de la diversité agissent ensemble et interagissent entre elles. C’est ce qu’ont proposé et montré par la suite Daan Van Knippenberg, Carsten De Dreu et Astrid Homan, une équipe de recherche néerlandaise [4 ; 5]. Selon eux, la diversité a globalement un effet positif sur l’équipe de travail. Mais des difficultés relationnelles peuvent entraver cet effet. Autrement dit, si elles sont trop fortes, ces difficultés empêchent l’équipe de profiter pleinement de la richesse de sa diversité.

Heureusement ces difficultés ne sont pas insurmontables. Un vivre-ensemble est largement possible et permet de libérer tout le potentiel positif de la diversité au travail.

CEM simplifié transparente
Version simplifiée du Categorization-Elaboration Model de Van Knippenberg, De Dreu et Homan

Faire pencher la balance du bon côté

Atteindre un bon vivre-ensemble, favorable à l’épanouissement de la diversité, peut se faire à plusieurs niveaux : au niveau de l’entreprise, au niveau de l’équipe et aussi à un niveau individuel.

Concernant l’entreprise dans son ensemble, le principal levier d’action est la culture d’entreprise et le climat de travail qui en découle. Il n’est pas seulement question de diversifier les collaborateurs et les collaboratrices. Il s’agit de bâtir un contexte de travail, où toutes et tous se sentent inclus.e.s et reconnu.e.s, qu’ils et elles appartiennent à une minorité ou à une majorité. Un tel contexte met en avant que toutes et tous font partie de l’entreprise, mais dans le même temps que chacun.e est accepté.e est dans son unicité et sa différence [6].

Ce principe se décline au niveau de l’équipe, où il repose entre les mains du management. En mettant en place un leadership inclusif, le ou la manager stimule le sentiment d’appartenance à l’équipe, tout en valorisant les spécificités de ses membres [7]. Il ou elle accomplit cet état en encourageant la communication au sein de l’équipe, en adoptant une prise de décision plus démocratique ou en s’assurant de l’équité, par exemple.

Même sans être manager ou chef.fe d’entreprise, chacun.e de nous peut agir pour le vivre-ensemble au travail et contribuer à la libération de la richesse de la diversité. Il nous revient d’apprendre à mieux interagir dans la différence, de découvrir nos biais pour les dépasser, de prendre le temps de comprendre l’autre et soi-même, d’accepter ce qui nous rassemble autant que ce qui nous sépare. Ceci peut s’accomplir en développant notre intelligence interculturelle (au sens large), c’est-à-dire en adoptant une attitude plus ouverte et réflexive, en apprenant de l’autre ou en développant des compétences comme l’adaptabilité [8].

S’il est possible d’agir à plusieurs niveaux de l’entreprise pour libérer tout le potentiel positif de la diversité, ces actions doivent prendre en compte toute la complexité du phénomène. Une politique pro-diversité mal construite peut avoir des conséquences néfastes sur l’entreprise et sur ses membres [9]. Bien sûr, ceci peut être évité avec une compréhension fine des processus en jeu et une bonne évaluation du contexte de travail.

Conclusion

La diversité est une richesse pour les entreprises et les sociétés. Mais son effet sur le fonctionnement des équipes de travail est complexe et a des conséquences ambivalentes. Favoriser le vivre-ensemble est essentiel pour libérer tout le potentiel de notre diversité. Si les entreprises et les managers peuvent le favoriser, nous pouvons aussi agir à notre niveau. En développant notre capacité à interagir dans la différence, nous soutenons le vivre-ensemble et l’essor de nos sociétés.

A propos de l’auteur

Benjamin Pastorelli est chercheur en psychologie du travail et consultant diversité et inclusion. Après une thèse sur la diversité et la créativité au travail, il a choisit la voie du conseil en entreprise. Aujourd’hui, il met son approche scientifique au service des équipes de travail pour les accompagner dans la libération du potentiel de leur diversité. Pour bâtir des ponts entre la recherche scientifique et le monde organisationnel, il a également fondé le blog LaborAgora.com. Retrouvez-le sur son site internet: http://benjaminpastorelli.com/.

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Sources de l’article

  1. Milliken, F. J., & Martins, L. L. (1996). Searching for common threads: Understanding the multiple effects of diversity in organizational groups. Academy of Management Review, 21(2), 402–433. https://doi.org/10.5465/AMR.1996.9605060217
  2. Stahl, G. K., Maznevski, M. L., Voigt, A., & Jonsen, K. (2010). Unraveling the effects of cultural diversity in teams: A meta-analysis of research on multicultural work groups. Journal of International Business Studies, 41(4), 690–709. https://doi.org/10.1057/jibs.2009.85
  3. Guillaume, Y. R. F. F., Dawson, J. F., Otaye-Ebede, L., Woods, S. A., & West, M. A. (2017). Harnessing demographic differences in organizations: What moderates the effects of workplace diversity? Journal of Organizational Behavior, 38(2), 276–303. https://doi.org/10.1002/job.2040
  4. van Knippenberg, D., De Dreu, C. K. W., & Homan, A. C. (2004). Work Group Diversity and Group Performance : An Integrative Model and Research Agenda. Journal of Applied Psychology, 89(November 2015), 1008–1022. https://doi.org/10.1037/0021-9010.89.6.1008
  5. van Knippenberg, D., & Hoever, I. J. (2018). Team Diversity and Team Creativity: A Categorization-Elaboration Perspective. In R. Reiter-Palmon (Ed.), Team Creativity and Innovation (pp. 41–60). Oxford: Oxford University Press.
  6. Stevens, F. G., Plaut, V. C., & Sanchez-Burks, J. (2008). Unlocking the Benefits of Diversity: All-Inclusive Multiculturalism and Positive Organizational Change. The Journal of Applied Behavioral Science, 44(1), 116–133. https://doi.org/10.1177/0021886308314460
  7. Shore, L. M., Randel, A. E., Chung, B. G., Dean, M. A., Ehrhart, K. H., & Singh, G. (2011, July). Inclusion and diversity in work groups: A review and model for future research. Journal of Management. https://doi.org/10.1177/0149206310385943
  8. Fantini, A. E. (2000). A central concern: Developing intercultural competence. SIT Occasional Papers Series, 1, 25–42.
  9. Verbeek, S. (2011). Employment equity policy frames in the literature: “good practice” versus “bad idea.” International Journal of Human Resource Management, 22(9), 1942–1962. http://doi.org/10.1080/09585192.2011.573972


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