Climat : 5 chercheurs qui œuvrent à sensibiliser la société
Ils sont scientifiques, chercheurs, professeurs d’université, directeurs d’institut, physiciens, ou encore astronomes. Mais surtout, ils contribuent à sensibiliser notre société aux enjeux liés au dérèglement climatique. Focus sur les cinq climatologues du moment.
Sommaire
Hervé le Treut, une aura climatique internationale
Hervé le Treut entre à l’École normale supérieure (ENS) en 1976. Deux ans plus tard, il prépare un doctorat sur la “modélisation des nuages dans le système climatique”, avant de soutenir sa thèse en 1985. Tout au long de sa carrière, le chercheur a énormément contribué à la compréhension des phénomènes qui interviennent dans l’évolution du climat : interaction atmosphère/océan, influence du cycle de l’eau et prise en compte des effets biochimiques. Par la suite, le scientifique originaire de Toulon se fait une place dans le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). En 2003, il avance que pour stabiliser l’évolution du système climatique, “il faudrait diviser par deux ou trois les émissions mondiales de gaz à effet de serre”, voire de carbone.
En novembre 2009, il publie son livre Nouveau climat sur la Terre : comprendre, prédire, réagir, aux éditions Flammarion. Il prévoit alors, du fait des émissions de CO2 bien “au-delà du pire scénario” prévu dans les projections du GIEC, une élévation des températures, selon les modèles, de 4 à 6 degrés d’ici la fin du siècle. La même année, l’échec de la Conférence de Copenhague l’engage à préciser que “si on ne fait rien, le seuil critique d’une hausse de 2 °C des températures sera franchi en 2050”.
Un message qu’il continue de faire passer alors que se déroule actuellement la COP26 à Glasgow : “Le problème crucial est celui de la gouvernance des COP. Il manque aux COP les mécanismes qui imposent que les engagements soient respectés et contraignants et qui permettent d’évaluer leur mise en œuvre. Ce n’est pas une raison pour accabler ce rendez-vous au sommet”, déclare-t-il à l’Humanité.
Reconnu internationalement, Hervé le Treut est récompensé par de nombreux prix, dont la médaille de bronze du CNRS en 1990. Il est également fait Chevalier de la Légion d’honneur en 2011. Actuellement, le scientifique opère sous différentes casquettes : il est directeur de l’Institut Pierre Simon Laplace (IPSL) et professeur en mécanique et physique de l’environnement à l’École polytechnique et à l’Université Pierre-et-Marie-Curie. Il enseigne également la dynamique climatique à l’École normale supérieure ainsi qu’à Sciences Po.
Jean Jouzel, au service de la paléoclimatologie
Jean Jouzel devient docteur en sciences physiques en 1974 à l’issue d’une thèse sur la “complémentarité des mesures de deutérium et de tritium pour l’étude de la formation des grêlons”. Plutôt que d’intégrer le CNRS, le paléoclimatologue préfère rejoindre le laboratoire des sciences du climat et de l’environnement du commissariat à l’énergie atomique (CEA). Son objectif est de travailler avec Claude Lorius, glaciologue de 15 ans son aîné. Au cours de sa vie, Jean Jouzel va occuper plusieurs postes importants.
Il est d’abord nommé ingénieur de recherche au laboratoire isotopique au CEA de Saclay, avant d’en devenir le coresponsable en 1986. Trois ans plus tard, il prend la place d’adjoint au directeur du laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement du CNRS. De 2001 à 2008, il dirige l’Institut Pierre-Simon-Laplace (qui fédère neuf laboratoires regroupant environ 1 400 membres avec, à parts égales, des chercheurs, des ingénieurs et des étudiants). Il fait également partie du GIEC avec qui il obtient le Prix Nobel de la paix en 2007.
Dans les années 70, Jean Jouzel et Claude Lorius pensaient plutôt que la planète faisait face à une nouvelle période de glaciation (une phase paléoclimatique froide et une période géologique de la Terre durant laquelle une partie importante des continents est englacée).
Néanmoins, l’analyse de carottes glaciaires prélevées en 1982 et 1983 lors du projet Vostok en Antarctique grâce la technique du forage entraîne un changement complet de la vision des climatologues. Ces travaux, qui ont permis de reconstituer climat et environnement sur plus de 400 000 ans, ont largement contribué à ce que Jean Jouzel et Claude Lorius soient récompensés de la médaille d’Or du CNRS en 2002.
En 1987, les deux collègues publient une série d’articles dans la très réputée revue scientifique Nature. Selon Jouzel, cette expérience “démontre que pendant les périodes froides il y a moins de CO2 et que pendant les périodes chaudes il y en a davantage. Nous confirmons ainsi que ce qui préside aux grandes phases, c’est bien l’astronomie, la position de la Terre par rapport au Soleil, mais que, lors des réchauffements, le CO2 amplifie le phénomène”. Depuis cette période, Jean Jouzel est reconnu mondialement pour ses analyses de la glace de l’Antarctique et du Groenland permettant de connaître le climat terrestre passé (paléoclimatologie).
Valérie Masson-Delmotte, face à la menace climatosceptique
Valérie Masson soutient une thèse de doctorat en physique des fluides et des transferts à l’École centrale Paris en 1996. Elle confronte les simulations de climats passés et les indices issus d’archives naturelles, pour évaluer la capacité des modèles de climat.
La même année elle intègre le CEA grâce à… Jean Jouzel. En 1998, elle devient responsable de l’équipe Glaces et continents, climats et isotopes stables (Glaccios). Mariée à Marc Delmotte, étudiant que Jean Jouzel avait pris sous son aile, elle prend le nom de Valérie Masson-Delmotte. L’une des expertises de l’équipe est l’étude des carottes de glace issues des glaces polaires. Dans ces régions, la neige s’accumule en couches successives, puis se transforme en glace. Or, l’eau et l’air qu’elle contient renferment de précieuses informations sur le climat, enregistrées au moment de la chute de neige.
En prélevant des carottes de glace de plus en plus profondément, il est possible de remonter dans le temps et de reconstituer le climat d’il y a plusieurs centaines de milliers d’années. Après une première mission au Groenland en 1997, rebelote 11 ans plus tard avec une nouvelle excursion “en famille” : Pendant que la scientifique travaille la calotte glaciaire au nord-ouest, Marc Delmotte est sur la côte sud, où il participe à l’installation d’une station de suivi atmosphérique des gaz à effet de serre.
Pour Valérie Masson-Delmotte, la vulgarisation scientifique est primordiale. C’est pourquoi elle écrit des ouvrages à destination des enfants, d’autres pour le grand public afin d’expliquer les connaissances scientifiques sur l’évolution du climat, et leurs impacts. De même, celle qui est nommée directrice de recherche en 2008 met un point d’honneur à combattre le climatoscepticisme.
En particulier, elle est à l’origine de “l’appel des 400”, en 2010, qui rassemblait environ 400 spécialistes du climat. Cet appel demandait aux instances scientifiques et politiques une réaction vis-à-vis des critiques dont ces climatologues faisaient l’objet de la part de chercheurs niant la responsabilité humaine dans les changements climatiques.
Autre exemple de l’engagement de Valérie Masson-Delmotte : ses travaux pour le GIEC et sa participation à la rédaction des 4e et 5e rapport. La revue scientifique Nature la classe dans le top 10 des scientifiques qui ont marqué l’année 2018. Il faut dire que l’experte du climat a rédigé un rapport sur les conséquences d’un réchauffement climatique limité à 1,5 °C, en agrégeant plus de six mille publications sur le sujet en un an et demi seulement. L’année suivante elle est médaillée d’argent par le CNRS. Une sacré performance.
Aurélien Barreau, de l’astronomie au réchauffement climatique
Aurélien Barrau a la particularité d’avoir obtenu deux doctorats. Le premier, en astrophysique à l’université Joseph-Fourier en 1998 qu’il décroche avec la mention très honorable et les félicitations du jury, sur le sujet “Astrophysique gamma de très haute énergie, étude du noyau actif de galaxie mrk501 et implications cosmologiques”. Presque 20 ans plus tard, en 2016, il présente cette fois-ci une thèse en philosophie portant sur “Anomies : une déconstruction de la dialectique de l’un et de l’ordre entre Jacques Derrida et Nelson Goodman”. Le jury est séduit et lui accorde la mention très honorable, une nouvelle fois.
Astronome, physicien, professeur d’université, cosmologiste, philosophe, poète, astrophysicien, chercheur… Le scientifique est présent sur bien des fronts. Il est par ailleurs un fervent militant de l’écologie politique, ce mouvement largement diffusé dans les années 70 qui insiste pour que soient pris en compte les enjeux écologiques dans l’action politique et dans l’organisation sociale.
Avec l’actrice Juliette Binoche, Aurélien Barreau lance un appel intitulé “Le Plus Grand Défi De l’histoire de l’Humanité” dans le journal Le Monde en septembre 2018 suite à la démission du ministre de l’écologie Nicolas Hulot. Le texte est signé par 200 personnalités. La tribune soutient qu’il faut une action politique immédiate face au réchauffement climatique.
Dans le même esprit, Aurélien Barrau publie un ouvrage au nom similaire. Selon lui, l’état d’urgence écologique s’appuie sur des phénomènes déjà en cours. Il cite la baisse des populations d’animaux sauvages (60 % en moins depuis 40 ans), et la chute des deux tiers de la biomasse dans la branche du vivant qui comporte le plus d’individus et d’espèces.
Il relie cela à la disparition des espaces naturels, la pollution et la prédation humaine et ajoute que le réchauffement climatique deviendra un facteur aggravant : “N’ayons pas l’impression qu’il faut accélérer l’effort car il faut le commencer. Nous n’avons rien fait pour le moment. Chaque année est pire que la précédente”.
Contrairement à la mouvance collapsologiste, (courant de pensée apparu dans les années 2010 qui envisage les risques d’un effondrement de la civilisation industrielle et ses conséquences) Aurélien Barreau ne croit pas à un effondrement spectaculaire et brutal de notre société. Il propose ainsi d’adopter un modèle de société « raisonnable et révolutionnaire” basé sur la remise en cause de la vision hégémoniste occidentale pour,selon lui, parvenir à relever les défis du 21e siècle. Cela se traduit majoritairement par l’arrêt de notre consommation excessive en énergies fossiles, en viande etc… L’être humain est-il capable de tels “sacrifices” ?
Syukuro Manabe, pionnier de la recherche sur le climat et Nobel de Physique 2021
Syukuro Manabe obtient un doctorat en philosophie à l’Université de Tokyo en 1958. Sans perdre de temps, il déménage aux Etats-Unis pour travailler à la section de la recherche en circulation atmosphérique générale du US Weather Bureau, devenu le laboratoire de dynamique des fluides géophysiques de la NOAA.
Par la suite, Manabe et un collègue, Richard T. Wetherald , constatent qu’en réponse à la variation de la concentration atmosphérique de dioxyde de carbone, la température augmentait à la surface de la Terre et dans la troposphère, alors qu’elle diminuait dans la stratosphère. Leur article de 1967 est parfois considéré comme le plus influent de la recherche sur le climat.
En 1969, Manabe et Kirk Bryan publient les premières simulations du climat avec des modèles couplés océan-atmosphère, explorant le rôle du transport de la chaleur océanique dans la détermination de la distribution mondiale du climat. Tout au long des années 1990 et au début des années 2000, le groupe de recherche de Manabe a publié des articles et fait des présentations à des séminaires. Ils ont utilisé les résultats des modèles couplés pour étudier la réponse du climat aux changements des concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
Ils ont également appliqué le modèle à l’étude des changements climatiques passés, y compris le rôle de l’apport d’eau douce dans l’océan Atlantique Nord comme une cause potentielle de ce que l’on appelle le changement climatique abrupt évident en paléoclimatologie.
En 2021, Syukuro Manabe est récompensé par le Prix Nobel de Physique pour ses travaux réalisés dans les années 1960. Ils ont permis de montrer que les niveaux de CO2 dans l’atmosphère correspondaient à la hausse des températures terrestres. Le climatologue américain (il a été naturalisé en 1975) partage le prix avec Klaus Hasselmann.
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Par Léo Olivieri, journaliste web et responsable de la newsletter Back To Science chez Okay Doc.
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One Response
Aurélien Bareau n’est pas plus climatologue que n’importe qui. C’est surtout un personnage avide de se voir mis en lumière.